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continuum
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oui oui mer
oui oui peut-être avait-il raison qui sait finalement peut-être avait-il quoique – les choses sont si si petites elles passent comme ça comme ça et les feuilles mortes o oui et là dans la rue soudain ouais soudain là le fracas bruit souffle oui oui toujours là-dessus commence et là dans la rue soudain ouais soudain là le fracas bruit souffle dans la rue qui descend là ouais vers le port vers la mer vers l’eau poisseuse et puis plus loin bleue vers la mer bleue d’iroise ouais vers les boats ouais vers les quais ouais vers les docks ouais vers le bas ouais cette putain d’odeur dès que dès que l’on descend du train ouais du wagon wagon ouais cette odeur là la mer ouais l’ordure les rues crades ouais le musc et la mer ouais la mer la mer ouais voilà et puis descendant là vers la mer descendant dégringolant dans les rues à putes les putes blacks les putes aux grosses jambes ouais vers la mer vers la mer la mer toujours oui me disais-je tu crois pas que je sais pas que et je descend heureux après picole dans les bars bondés d’hier après après les putains de rhums ouais et descends vers la mer ouais là-bas derrière les toits ouais vers la mer encore toujours la mer les goélands squattent sur les toits toits de tuiles arrosés de soleil avec au fond entre les toits les petites fenêtres pauvres ben la mer la mer toujours je descends je descendrai je descendrai tout à l’heure cette ruelle étroite raide crade avec les putes au bord en bas assises sur les voitures je descendrai tout à l’heure pour l’instant j’écoute coute coute du gros son dans l’appart que l’on ma prêté dans la baignoire il y a une grande trainée de rouille sur l’émaille blanche
les choses sont si petites elles passent comme ça ai descendu la rue la rue dégringolée suis passé devant les putains devant les grosses jambes des putains elles montrent assises sur des voitures ai dégringolé là en bas tu et voilà jusqu’à la mer jusqu’au port jusqu’à là le vent là l’odeur là le sel là le cailloux là le flux le reflux là le large la vague là la lumière bleue acier là le soleil là la chaleur là le rocher là la mer là la mer là le flux là le reflux là les barques là le sable là les bouteilles plastiques là la merde là là là là les vagues les algues là les poissons crevés là le bleu le vert le jaune le blanc le bleu le bleu la corniche quand on passe les choses sont si petites oui et ce soleil cette lumière bleue acier tendue blanche ouais là dans le trouble de la mer le trouble bleu vert les rochers les pneus les sacs les sacs plastiques bleus et toute la puissance de la mer le sel le sel le sel oui et comme comme toujours toujours on marche on marche je marche vers la mer la mer la mer et ce trouble du bleu du vert sur le fond blanc sur le fond vert quand on passe les choses sont si puissantes les choses sont si fortes et les vagues des vagues quand on passe les choses sont si fortes si puissantes et les vagues des vagues des vagues des vagues
et souffl et flux et reflux et souffl
et souffl et flux et reflux encore
oui là quand on passe c’est toujours aussi puissant aussi blanc aussi éblouissant aussi piquant aussi blanc aussi blanc et le sel le sel le sel et la mer la mer on y revient toujours la lumière tendue blanche au trouble de la mer
oui oui oui mer on y revient toujours on y toujours on ne peut que accoudé à la corniche on voit partir accoudé on voit partir au loin on voit partir au loin les barques on voit partir au loin le regard vers la corniche la mer le flot flot des bouteilles flottant sur le flux on regarde là et c’est comme si passé comme si passait on regarde là les choses aller et venir on regarde loin au loin on regarde les choses flotter on imagine ceux qui sont arrivés là ceux qui ont vu l’arrivée là ceux qui sont arrivés d’autres espaces ceux qui sont arrivés migrants ceux qui ont vu en arrivant la corniche là flottant entre deux brumes de chaleurs sous la lumière aveuglante l’éclat du calcaire blanc lessivé on regarde au loin le regard vague on plisse on regarde dans la lumière blanche aveuglante l’odeur prenant l’odeur prégnante on regarde ce qui vient là-bas de minces filets blancs de minces traits blancs flottant faisant route faisant vers le large faisant route vers le large là là-bas et on regarde on regarde ce vieux sac plastique flotter traverser la nasse traverser l’entrée du port et là grand axe fort rectiligne la jetée et on regarde la jetée les gros bateaux là-bas sur le dock béton sur le dock peinture sur le dock acier sur le dock rouille on regarde et au loin derrière l’axe rectiligne les déchargements sous le soleil on regarde dans cette odeur de silex de béton brûlant de vieux filet de coquillage et de grue on regarde les grues

et on se dit que là-bas en regardant au loin on verrait peut-être là-bas de l’autre côté là cette ligne là-bas de l’autre côté est-ce que ce ne serait pas est-ce que ce ne serait pas ça que l’on aperçoit là-bas et on regarde accoudé on regarde on ne se lasse pas de regarder accoudé regarder aller et venir là-bas au loin quelques barques et le sac plastique flotter dans l’huile et l’odeur de silex frappe et on regarde on regarde on regarde parle peu avec les copains qui regardent regardent en même temps regardent d’un même regard vers le inlassable regardent le inlassable continu flux regarde le inlassable ligne là-bas le inlassable trait là-bas que deux trois barques traversent on se dit peu de choses on se dit juste que là où le regard le inlassable flot bleu traversent quelques traits traversent et souffle gros vent qui nous balaie gros vent tiède qui nous souffle gros vent tiède qui nous souffle les mèches et les cheveux secs claquant les drapeaux de plage claquant accoudé on regarde là-bas on touche la mer on touche l’eau bleue verte le fond vert ocre les drapeaux de plage on plonge dans l’eau on claque des dents on caille on se marre on se frictionne on court sur les rochers on court à poil les drapeaux claquent
et on se remet en marche à main droite la mer toujours